Mantı : Voyage Culinaire à Travers les Régions Turques (et au-Delà !)
Ah, le mantı ! Cette petite merveille de pâte farcie, symbole de convivialité et de délices. Mais au fait, de quelle région vient donc ce plat savoureux qui fait frétiller nos papilles ? C’est une excellente question, et la réponse, mes amis, est un peu comme un bon plat de mantı : riche et pleine de saveurs, avec un petit supplément d’histoire pour digérer tout ça. Le mantı, ce n’est pas juste un plat, c’est une épopée gustative qui traverse les âges et les frontières. Ses racines plongent loin, très loin, jusqu’en Asie Centrale et en Chine. Imaginez un peu : au fin fond de ces contrées lointaines, des peuples nomades, probablement en pleine réflexion sur comment rendre la vie un peu plus gourmande, ont eu l’idée de farcir de la pâte avec de la viande. Génial, non ? L’histoire raconte que cette ingénieuse invention a ensuite voyagé à dos de chameau (ou peut-être de cheval, soyons précis) à travers l’immensité de l’Asie, pour finalement atterrir en Turquie, probablement vers le 13ème siècle. On peut remercier les Turcs d’avoir eu le bon goût d’adopter cette pépite culinaire ! Et devinez quoi ? Le mantı n’a pas fait que transiter par la Turquie, il y a carrément élu domicile, et avec panache ! Au point de devenir une star de la cuisine ottomane, s’il vous plaît ! Imaginez les sultans, les vizirs, tous en train de se régaler de ces petites bouchées divines. C’est dire si le mantı a su conquérir les palais les plus exigeants. De la Chine à la table des sultans, quelle ascension fulgurante ! Maintenant, si on parle de mantı en Turquie, il y a une ville qui résonne plus fort que les autres : Kayseri. Kayseri et le mantı, c’est une histoire d’amour qui dure depuis des siècles. Quand on dit « mantı », spontanément, 99% des Turcs (et probablement quelques gourmands du monde entier) pensent à Kayseri. C’est un peu comme dire « pizza » et penser à l’Italie, ou « sushi » et penser au Japon. Kayseri, c’est LA capitale du mantı en Turquie, point final. Ce n’est pas pour rien que Kayseri est considérée comme la Mecque du mantı. Déjà, le mantı de Kayseri est officiellement enregistré et protégé par le Türk Patent ve Marka Kurumu depuis 2009, avec un label « indication géographique ». C’est un peu comme une appellation d’origine contrôlée, mais pour le mantı. Ça vous donne une idée du sérieux de la chose. Et puis, cerise sur le mantı, il paraît qu’il existe pas moins de 36 variétés de mantı à Kayseri. 36 ! De quoi manger du mantı tous les jours pendant plus d’un mois sans jamais se lasser. Chaque variété a sa petite particularité, sa petite touche de magie. C’est un véritable festival de mantı à Kayseri ! Mais qu’est-ce qui rend le mantı de Kayseri si unique ? Déjà, sa taille. Le mantı de Kayseri, c’est un peu le « petit pois » du mantı. Il est minuscule, infiniment petit. La légende raconte (et c’est une légende très sérieuse, croyez-moi) qu’à Kayseri, autrefois, pour tester les futures belles-filles, les mamans leur faisaient passer l’épreuve du mantı. Le défi ? Faire tenir le maximum de mantı dans une cuillère à soupe. Plus la jeune femme réussissait à en caser, plus elle était considérée comme habile et donc, mariable. Si elle osait en plus oublier la menthe (reyhan) dans sa préparation, c’était carrément carton rouge ! Autant vous dire que les jeunes filles de Kayseri ont intérêt à maîtriser l’art du mini-mantı sur le bout des doigts. Et la forme, parlons-en ! Le mantı de Kayseri a une forme bien à lui, en petite bourse, ou en petit paquet cadeau, c’est selon votre imagination. C’est cette forme particulière qui le distingue des autres mantı, plus « carrés » ou « rectangulaires ». C’est un peu la signature du mantı de Kayseri. Maintenant, soyons justes, Kayseri n’a pas le monopole du mantı en Turquie. Non, non, loin de là ! La Turquie est un pays riche en régions, et chaque région a sa propre version du mantı, avec ses petites variations locales. Prenons par exemple le mantı de Sinop. Lui, il a une particularité qui fait toute la différence : il est servi avec des noix ! Des noix concassées, généreusement saupoudrées sur le mantı. Avouez que c’est original ! Ça apporte un petit côté croquant et un parfum délicat qui se marie à merveille avec le reste. Le mantı de Sinop, c’est un peu le « mantı-noisette », si on veut. Et puis, il y a le mantı de Nevşehir, plus discret, mais tout aussi savoureux. Le mantı d’Avunya, une région entre Çanakkale et Balıkesir, qui nous vient des bords de la mer Égée. Le tepsi mantısı, cuit au four sur une plaque, pour un côté croustillant irrésistible. Le hingel, venu du Caucase, qui se déguste dans l’est de la Turquie, notamment à Artvin et Kars. Le yağ mantısı de Kayseri (encore lui !), frit à l’huile pour une texture croustillante à l’extérieur et moelleuse à l’intérieur. Le bodrum mantısı, ou çıtır mantı, la version « chips » du mantı, parfaite pour l’apéro. Le boşnak mantısı de Kırklareli, hérité des traditions bosniaques. Le tatar mantısı, venu tout droit du Tatarstan, pour un voyage culinaire encore plus lointain. Le saçaklı mantı de Balıkesir, avec ses petites « franges » de pâte croustillantes. Le sini mantısı de Kütahya, cuit dans un plat en terre. Le üçgen mantı d’Erzurum, en forme de triangle, logique. Le kulak mantısı de Sinop (encore Sinop !), en forme d’oreille, d’où son nom. Le nohutlu mantı de Bilecik, avec des pois chiches, pour une version plus consistante. Et enfin, le kandilli mantı de Tekirdağ, en forme de lanterne, pour illuminer vos papilles. Vous voyez, le mantı, c’est un peu comme un caméléon culinaire. Il se transforme, il s’adapte, il se réinvente selon les régions, les traditions, les envies. Mais il garde toujours son âme de mantı, cette petite bouchée de bonheur qui nous réchauffe le cœur et l’estomac. Et le mot « mantı », d’où vient-il donc ? Là aussi, l’histoire est intéressante. Il semblerait que le mot « mantı » vienne du persan « mantu », qui signifie « dolma roulée ». Ou peut-être du mongol « mantu », qui désigne un plat de pâte farcie en forme de bourse. Les linguistes se disputent encore un peu sur l’origine exacte, mais ce qui est sûr, c’est que le mot « mantı » a une longue histoire derrière lui, tout comme le plat lui-même. Le mantı, ce n’est pas juste un plat qu’on mange comme ça, distraitement, devant la télé. Non, non, c’est un plat qui se savoure, qui se partage, qui se déguste avec respect et gourmandise. En Turquie, comme en Asie Centrale, le mantı est préparé avec amour, avec soin, avec une attention particulière aux détails. C’est un plat qui demande du temps, de la patience, de la passion. C’est un plat qui rassemble les familles, les amis, autour d’une table conviviale. C’est un plat qui fait voyager, qui nous raconte des histoires, qui nous fait découvrir des cultures différentes. Et si vous voyagez un peu, vous verrez que le mantı n’est pas une exclusivité turque. Non, non, il a des cousins un peu partout dans le monde. En Chine, il y a les jiaozi, ou gyoza en japonais, des petits raviolis farcis, souvent grillés ou bouillis. En Corée, il y a les mandu, des raviolis vapeur ou frits. En Russie, il y a les pelmeni, des petites boules de pâte farcies à la viande, servies avec de la crème fraîche. En Ouzbékistan, il y a les chuchvara, ou berek, des raviolis en bouillon. Partout dans le monde, le mantı prend des formes différentes, des noms différents, mais garde toujours son esprit de pâte farcie, de bouchée gourmande, de plat réconfortant. Alors, la prochaine fois que vous dégusterez un bon plat de mantı, pensez à tout ce voyage, à toute cette histoire, à toutes ces régions, à toutes ces cultures qui se sont croisées pour donner naissance à cette merveille culinaire. Et surtout, savourez chaque bouchée, avec délice et gratitude. Ah, et un dernier petit détail, pour la route : en argot turc, « mantı » peut aussi désigner un jeune homme un peu « fade », un peu « blanc ». Rien à voir avec le délicieux plat, évidemment. Mais c’est toujours bon à savoir, pour briller en société. Et en anglais, « mantı » se dit « dumpling ». Voilà, vous savez tout (ou presque) sur le mantı. Bon appétit !