Quel est le nom de la sauce de poisson romaine ? Un voyage savoureux (et un peu dégoûtant) dans le passé !
Ah, la Rome antique ! Des gladiateurs, des toges, et… de la sauce de poisson ? Oui, vous avez bien entendu ! Si vous vous êtes déjà demandé quel était le nom de cette fameuse potion magique romaine qui relevait tous leurs plats, accrochez-vous, car nous allons plonger dans le monde fascinant – et parfois un peu nauséabond – du garum !
Alors, pour répondre directement à votre brûlante question : la sauce de poisson romaine s’appelait principalement garum. Mais attention, ce n’est pas aussi simple qu’une seule étiquette. Imaginez le garum comme le ketchup de l’Antiquité, mais en beaucoup, beaucoup plus complexe (et potentiellement plus… odorant). Disons que si le ketchup était fabriqué à partir de poisson fermenté au soleil pendant des semaines, vous seriez proche de l’idée.
Maintenant, ne vous enfuyez pas en courant ! Avant de grimacer et de vous dire que les Romains avaient des goûts étranges, laissez-moi vous expliquer pourquoi le garum était en réalité un ingrédient vedette, presque une obsession culinaire pour nos amis en toge. Et puis, après tout, on adore bien le nuoc-mâm ou le colatura di alici, non ? C’est un peu de la même famille, en quelque sorte… Sauf que le garum avait ses propres nuances, ses propres versions « grand cru » et ses déclinaisons plus « premier prix ». Accrochez-vous, ça devient intéressant !
Le Garum : L’Élixir Umami des Césars (et des autres !)
Le garum, c’était un peu le couteau suisse de la cuisine romaine. On en mettait partout ! Viandes, poissons, légumes, potages… C’était l’exhausteur de goût ultime, bien avant l’arrivée du glutamate monosodique. Et figurez-vous que les Romains, fins gourmets devant l’éternel, avaient même classifié le garum en différentes catégories, un peu comme nos vins aujourd’hui.
L’ingrédient de base ? Un petit poisson mystérieux appelé « garos » à l’origine, mais très vite remplacé par du scombre (le maquereau, pour les intimes) ou d’autres poissons plus communs. Le principe ? La fermentation ! On mélangeait les entrailles de poissons (oui, oui, vous avez bien lu), le sang, les branchies (toujours aussi glamour, n’est-ce pas ?) avec du sel, et on laissait macérer tout ça au soleil pendant des semaines, voire des mois ! Imaginez les effluves ! C’est sûr que ça devait embaumer les quartiers de production…
Mais le résultat, après filtration, était un liquide précieux, l’élixir umami tant convoité : le garum. Et attention, certaines variétés atteignaient des prix stratosphériques ! Pline l’Ancien, véritable chroniqueur de la vie romaine, nous raconte qu’un certain « garum sociorum » (le garum des alliés, rien que ça !) se vendait une fortune, plus cher que le salaire annuel d’un légionnaire ! Autant dire que c’était un produit de luxe, un peu comme la truffe blanche aujourd’hui.
Et pour les palais les plus délicats, il existait même le « haemation », le nec plus ultra du garum, fabriqué à partir du sang de thon. Imaginez un peu le prestige ! On devait frimer grave en disant à ses convives : « Ah, mais ceci, c’est du haemation, vous comprenez ? ».
Liquamen, Allex, Muria : La Famille Élargie du Garum
Mais le garum n’était pas seul dans la famille des sauces de poisson romaines. Il avait des cousins, des frères, des seconds couteaux, chacun avec son rôle et sa spécificité.
Le liquamen, par exemple, était souvent considéré comme une version plus « light » du garum. En fait, il s’agissait du liquide filtré lors de la production du garum. Quand on filtrait la mixture de poisson fermenté, le liquide qui passait à travers le panier, c’était le liquamen. Certains le considéraient même comme un synonyme de garum, mais d’autres le voyaient comme une qualité inférieure. Un peu comme comparer un grand vin de Bordeaux à un vin de table, si vous voulez.
Et puis, il y avait l’allex (ou allec, hallec, hallex, les orthographes variaient un peu à l’époque, c’était moins standardisé qu’aujourd’hui). L’allex, c’était le « reste », le fond du tonneau, les sédiments, la purée de poisson fermenté qui restait après avoir extrait le liquamen. Autant dire que c’était la version économique, le « garum du pauvre ». Mais attention, même l’allex avait ses fans ! Pline nous dit qu’à son époque, c’était devenu un luxe, une sorte de pâte de poisson prisée. Comme quoi, tout est relatif !
Enfin, mentionnons la muria. La muria, c’était la saumure, le jus aqueux qui s’échappait du poisson sous l’effet du sel. Isidore de Séville la décrivait comme « le goût de la mer ». On utilisait la muria pour conserver le poisson, mais aussi comme condiment, probablement plus léger et plus salé que le garum ou le liquamen.
Les Cocktails Romains : Hydrogarum, Oenogarum, Oxygarum et Mellogarum
Et pour les Romains qui aimaient varier les plaisirs, il existait même des « cocktails » à base de garum ! Imaginez un peu :
- L’hydrogarum : du garum mélangé à de l’eau. Rafraîchissant, non ? Bon, peut-être pas pour tout le monde…
- L’oenogarum : du garum au vin ! Voilà qui commence à devenir intéressant. Un peu comme un bourguignon au garum, en quelque sorte.
- L’oxygarum : du garum au vinaigre. Pour les amateurs de sensations fortes !
- Le mellogarum : du garum au miel ! Là, on touche au sucré-salé, une combinaison qui était déjà appréciée à l’époque.
Ces mélanges étaient utilisés dans de nombreuses recettes, notamment celles compilées par Apicius, le célèbre gastronome romain. Il paraît même qu’il aimait préparer des rougets tués dans du garum de rouget ! Cannibalisme culinaire ? Peut-être bien !
Le Garum de Pompéi : Une Marque de Luxe Antique
Pompéi, avant d’être figée dans les cendres du Vésuve, était une ville réputée pour son garum. Et l’un de ses plus riches habitants, un certain Aulus Umbricius Scaurus, était justement un producteur de garum de luxe ! Il avait même décoré sa maison de mosaïques représentant des jarres à garum, avec des inscriptions vantant la qualité de sa production : « Fleur de garum, de maquereau, produit de Scaurus, de la boutique de Scaurus ». La classe ! On peut dire que Scaurus avait compris l’importance du marketing, même avant l’heure !
Mais attention, malgré ce prestige, le garum restait un produit relativement abordable pour le consommateur lambda. Un tarif douanier de l’an 202 mentionne un droit de douane d’un sesterce par amphore de garum. Un sesterce, c’était pas la ruine, hein ! Après, il y avait différentes qualités, différents prix, comme pour tout. L’édit des prix de Dioclétien (en 301 après J.-C.), qui fixait des prix maximums pour lutter contre l’inflation, distinguait même le « liquamen primum » (première qualité) et le « liquamen secundum » (deuxième qualité), avec des prix différents. Comme quoi, même à l’époque romaine, la qualité, ça se payait !
Conclusion : Le Garum, Plus Qu’une Sauce, Un Témoignage Historique
Alors, voilà, vous savez tout (ou presque !) sur le nom de la sauce de poisson romaine : garum, mais aussi liquamen, allex, muria… Un univers de saveurs fermentées, d’arômes puissants, qui nous paraît aujourd’hui un peu étrange, mais qui était au cœur de la gastronomie romaine.
Le garum, c’est bien plus qu’une simple sauce. C’est un témoignage de l’ingéniosité culinaire des Romains, de leur goût pour les saveurs complexes, et de leur capacité à transformer des ingrédients modestes en produits d’exception. Alors, la prochaine fois que vous mangerez une pizza ou des pâtes, pensez au garum, et imaginez le goût qu’auraient eu ces plats si les Romains les avaient connus ! Peut-être qu’un jour, le garum reviendra à la mode ? Qui sait ? En attendant, on peut toujours essayer de faire fermenter quelques sardines au soleil pour se faire une idée… Mais attention aux voisins !